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Nouvelles méthodes d'imagerie pour le cerveau

Les nanoparticules pour l'imagerie par résonance magnétique (IRM)

04/03/2024

Marlène Wiart

Laboratoire CarMeN (Cardiovasculaire, Métabolisme, Diabète et Nutrition), INSERM, INRA, INSA Lyon, Université Lyon 1

Fabien Chauveau

Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon, CNRS, INSERM, Université Lyon 1

Delphine Chareyron

ENS de Lyon / DGESCO

Résumé

Cet article s'intéresse à l'utilisation de nanoparticules comme agent de contraste pour l'IRM afin d'augmenter la qualité du diagnostic.


1. L'imagerie par résonance magnétique

L'imagerie par résonance magnétique (IRM) est une modalité d'imagerie médicale très utilisée pour le diagnostic des maladies touchant les tissus dits « mous » (cerveau, moelle épinière, muscles, tendons…).

Son principe repose sur les effets d'un champ magnétique sur les molécules d'eau qui composent notre corps. En effet, les molécules d'eau comprennent deux atomes d'hydrogène dont le noyau est constitué d'un proton. Les protons sont des particules chargées qui possèdent un moment magnétique. Dans un appareil d'IRM, les protons sont soumis à un champ magnétique intense. Le moment magnétique résultant (macroscopique) s'aligne avec le champ magnétique.

L'appareil IRM émet une onde radiofréquence qui vient perturber cet alignement et mesure ensuite le retour à l'équilibre des moments magnétiques à l'aide d'une antenne. La vitesse de retour à l'équilibre et la force du signal dépendent de la composition des tissus, ce qui permet de générer un contraste sur les images. L'IRM permet ainsi d'obtenir des images très précises en 3 dimensions, de manière très sécurisée, les ondes radiofréquences n'ayant pas d'effet négatif sur l'organisme.

Rappel sur le fonctionnement de l'imagerie par résonance magnétique (IRM)

On pourra retrouver le fonctionnement de l'imagerie par résonance magnétique dans le dossier sur l'imagerie médicale sur le site du CEA [1][2][3].

Vidéo de présentation de l'IRM

Source : CEA [2].

L'IRM anatomique

Source : Corinne Beurtey/CEA, Dossier sur l'imagerie médicale le site du CEA [1].

2. Nanoparticules couplées à l'IRM

Les agents de contraste sont souvent utilisés pour améliorer la valeur diagnostique de l'examen (par exemple en faisant ressortir une tumeur par rapport au tissu environnant). En IRM, les agents de contraste les plus utilisés sont les chélates de gadolinium. Cet ion paramagnétique (Gd3+) n'est pas aimanté en l'absence d'un champ magnétique mais acquiert, sous l'effet du champ, une aimantation orientée dans le même sens que le champ. Les nanoparticules d'oxyde de Fer (SPIO pour "superparamagnetic particles of iron oxide", de taille comprise entre 50 nm et 100 nm, ou USPIO dans leur version "ultrasmall", de taille inférieure à 50 nm) constituent une autre classe d'agents de contraste. Ces matériaux métalliques de très petite taille sont dits "superparamagnétiques" car ils s'aimantent très fortement (par coopération entre les particules) en présence d'un champ magnétique extérieur.

En clinique, ces nanoparticules ont des applications pour l'imagerie des vaisseaux (angiographie), du foie (détection de tumeurs) ou encore du système lymphatique (détection de métastases). Dans le domaine de la recherche, elles sont étudiées pour réaliser l'imagerie de l'inflammation. En effet, certaines cellules du système immunitaire vont les phagocyter (‘manger') lorsqu'elles les rencontrent, principalement les macrophages (‘gros mangeurs') dont l'un des rôles est précisément de nettoyer l'organisme et d'identifier d'éventuels intrus. De ce fait, ces cellules vont avoir des propriétés magnétiques. Il devient alors possible de les détecter et de les suivre en IRM (figures 1 à 4), ce qui est une manière d'appréhender la réponse inflammatoire. Cela représente un grand progrès car il existe actuellement peu de techniques d'imagerie médicale donnant une information aussi précise sur l'inflammation.

Les (U)SPIOs sont constituées de particules de petite taille (inférieure à 100 nm voire à 50 nm pour les ultrasmall) qui ont l'avantage d'être biocompatibles et faiblement toxiques. Certaines d'entre elles sont utilisées aux États-Unis pour le traitement de l'anémie (carence en Fer). Elles ont donc déjà été administrées à un très grand nombre de patients sans problème. Cependant, leur utilisation en tant qu'agent de contraste est plus difficile car elles n'ont pas encore démontré de supériorité diagnostique pour leurs indications principales (le diagnostic de certains cancers).

Ainsi, aujourd'hui, on ne peut réaliser l'imagerie de l'inflammation en IRM couplée à l'administration d'(U)SPIO que dans le cadre de protocoles cliniques très encadrés. Cependant, la recherche pré-clinique (chez le petit animal de laboratoire) et clinique (chez les patients) est très dynamique et devrait permettre à terme de voir émerger des applications chez l'Homme. Ainsi, cette nouvelle approche d'imagerie pourrait ouvrir la voie à une meilleure compréhension des maladies, à un meilleur diagnostic de leur composante inflammatoire, et au développement de nouvelles thérapies adaptées à chaque patient (médecine personnalisée). Parmi les applications phares, on peut citer la sclérose en plaque, une maladie neurologique auto-immune caractérisée par des pics de réaction inflammatoire, ou encore l'accident vasculaire cérébral. Cela suppose de mener une recherche pluridisciplinaire, à l'interface entre la médecine, la biologie, la physique et le traitement du signal et de l'image.

Les figures 1 à 4 présentent l'IRM réhaussée avec les nanoparticules d'oxyde de Fer (USPIOs) dans le cerveau d'une souris présentant une neuroinflammation. Les signaux hypointenses (noirs) proviennent de l'internalisation des USPIOs par les cellules immunitaires (macrophages) et mettent donc en évidence la présence d'une réaction inflammatoire.

Différentes concentrations de solution de nanoparticules d'oxyde de Fer (USPIOs) et tube témoin

Figure 1.  Différentes concentrations de solution de nanoparticules d'oxyde de Fer (USPIOs) et tube témoin

Source : Marlène Wiart et al. (données non publiées)


A) Les USPIOs sont des nanoparticules d'oxyde de Fer (diamètre < 50 nm) qui se présentent sous forme de solution colloïdale. Le tube de droite montre la couleur « rouille » de la solution en comparaison avec un tube sans USPIOs.

B) Un tube contrôle sans USPIO (0) et des tubes avec une concentration croissante de USPIOs sont placés dans l'IRM. L'augmentation de la concentration [c] en Fer entraîne une chute du signal qui devient « hypointense » (noir).

IRM réhaussée de nanoparticules d'oxyde de Fer (USPIOs) du cerveau d’une souris saine

Figure 2.  IRM réhaussée de nanoparticules d'oxyde de Fer (USPIOs) du cerveau d’une souris saine

Source : Marlène Wiart et al. (données non publiées)


C) Cerveau d'une souris saine imagée in vivo par IRM avant et après administration des USPIOs. En l'absence d'inflammation, les USPIOs ne produisent pas de signal sur l'image.


D) Cerveau d'une souris avec un modèle de neuroinflammation imagée par IRM avant et après administration d'USPIOs. En présence d'inflammation et avant l'administration d'USPIOs, le cerveau apparaît identique à celui de la souris saine. Après l'administration d'USPIOs, des signaux hypointenses sont visibles au niveau de régions appelées « plexus choroïdes » (flèches).

Ces signaux proviennent de l'internalisation des USPIOs par les cellules immunitaires (macrophages) et mettent donc en évidence la présence d'un phénomène inflammatoire.

L'histologie (insert) confirme que ces signaux proviennent du Fer des USPIOs (coloration au Bleu de Perls, flèches).

La figure 4 présente l'IRM 3D haute résolution du cerveau isolé présentant une neuroinflammation.

Références

[1] L'essentiel sur… L'imagerie médicale, CEA, consulté en septembre 2023.

[2] L'IRM, CEA, consulté en septembre 2023.

[3] L’imagerie par résonance magnétique (IRM), CEA, consulté en septembre 2023.

Pour citer cet article :

Nouvelles méthodes d'imagerie pour le cerveau - Les nanoparticules pour l'IRM, Fabien Chauveau, Marlène Wiart, mars 2024. CultureSciences Physique - ISSN 2554-876X, https://culturesciencesphysique.ens-lyon.fr/ressource/Imagerie-IRM.xml

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